Trois regards sur l’enseignement supérieur : fractures, réinventions, urgences
L’été est souvent une parenthèse propice à la réflexion. Chez Seira, nous avons voulu profiter de ce temps suspendu pour mettre en lumière trois articles récents qui, chacun à sa manière, interroge les tensions, les promesses et les angles morts de l’enseignement supérieur – en France comme à l’échelle globale. Ce panorama de l’été 2025 propose ainsi un itinéraire en trois étapes : une plongée dans les fractures internes des établissements français, une conversation sur les nouveaux équilibres du savoir venus du Sud, et une alerte sur les besoins criants de compétences à l’échelle régionale.
1. Derrière les outils, les fissures : CRM et ERP comme révélateurs d’une crise organisationnelle
La transformation numérique dans l’enseignement supérieur ne se limite pas à l’adoption d’outils. Elle révèle aussi, parfois brutalement, les failles d’un pilotage fragmenté. Cet article explore comment les systèmes CRM et ERP, censés fluidifier la gestion des établissements, deviennent paradoxalement des points de tension. Derrière les enjeux techniques, ce sont des questions plus profondes qui émergent : à quoi sert réellement un système d’information dans un établissement académique ? Qui en a la maîtrise ? Et pourquoi tant d’écoles semblent incapables de construire une vision intégrée, cohérente et orientée vers les utilisateurs – qu’ils soient étudiants, enseignants ou personnels ? Une lecture indispensable pour comprendre pourquoi la question technologique est avant tout politique et organisationnelle.
2. Repenser les modèles académiques mondiaux : la voix de l’Afrique
Et si les écoles africaines n’étaient pas des « suiveuses », mais des pionnières d’un nouveau paradigme ? Dans cet entretien avec Nicolas Arnaud, Directeur Général de Rabat Business School, c’est une tout autre vision qui se dessine : celle d’un enseignement supérieur plus agile, plus connecté aux enjeux locaux, mais aussi porteur d’une ambition globale. L’Afrique n’est plus un terrain d’application des modèles du Nord, mais un laboratoire vivant de réinvention académique. À rebours d’une hiérarchie figée du savoir, cet échange nous invite à penser l’avenir des formations et des institutions à partir d’une pluralité de centres, d’identités et de récits. Un souffle d’air frais dans un paysage trop souvent normé.
3. Une urgence locale : la Région Sud à court d’ingénieurs
Tandis que certains repensent les modèles à l’échelle mondiale, d’autres affrontent des défis très concrets sur le terrain. Dans cet entretien, Mickaël Bosco, directeur du campus Méditerranée de l’ESAIP, tire la sonnette d’alarme : le déficit d’ingénieurs dans la Région Sud devient critique. Les besoins des entreprises explosent, mais les viviers locaux restent insuffisants. Derrière cette pénurie, c’est toute la question de l’attractivité, de l’aménagement du territoire et de la capacité des écoles à s’ancrer dans les dynamiques régionales qui se joue. Un rappel salutaire que la réforme académique ne se décrète pas en surplomb, mais se bâtit dans le dialogue entre les acteurs de terrain.
🔍 Ce que nous disent ces trois textes
À première vue, ces articles semblent pointer dans des directions différentes – fracture organisationnelle, ambition panafricaine, urgence régionale. Et pourtant, un même fil les relie : la nécessité de replacer les finalités humaines, sociales et territoriales au cœur des politiques académiques.
Chez Seira, nous croyons que la transformation de l’enseignement supérieur ne peut plus être pensée comme une simple adaptation technique ou une course aux classements. Elle doit s’enraciner dans la complexité du réel : celle des organisations en tension, des territoires en attente, des Suds en quête de reconnaissance.
Bonne lecture, bel été — et à la rentrée pour d’autres dialogues essentiels.
